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La séance est ouverte à vingt-deux heures.
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AUTONOMIE FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES - deuxième lecture - (suite)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi organique pris en application de l’article 72-2 de la Constitution relatif à l’autonomie financière des collectivités territoriales.
ART. 3 (suite)
M. André Chassaigne - Lier l’autonomie financière à la seule autonomie fiscale des collectivités territoriales, comme vous le faites, est réducteur. M. Mercier, rapporteur de ce projet au Sénat, le dit : l’autonomie fiscale n’est pas l’autonomie de gestion. Et c’est cette dernière qu’il faut accroître. Elle est réduite par l’importance des compétences obligatoires, qui asphyxient certaines collectivités. Dans leur rapport sur la péréquation interdépartementale, les sénateurs François-Poncet et Belot s’inquiètent de la difficulté de certains départements à faire face à ces charges obligatoires.
Si l’on veut donner un nouveau souffle à la démocratie locale, il ne faut pas accabler les élus sous les compétences obligatoires, mais leur donner plus de liberté. Pour évaluer correctement l’autonomie financière réelle des collectivités territoriales, le rapport entre ressources propres et ressources totales est secondaire. Ce qui compte, c’est le montant des charges obligatoires. C’est ce que nous affirmons par l’amendement 37.
M. Guy Geoffroy , rapporteur de la commission des lois - La commission a repoussé cet amendement. Le problème mérite réflexion, mais la loi organique traite de l’autonomie financière au regard des ressources, et non des dépenses.
M. le Ministre délégué - Avis défavorable. Tout le talent de M. André Chassaigne ne suffit pas à me convaincre. Ce n’est pas une bonne solution que de réduire encore le ratio d’autonomie financière, et le faire en fonction de la destination des dépenses serait instaurer la confusion des genres.
M. René Dosière - Cette préoccupation est réelle, et mérite notre attention. Je rappelle que c’est grâce à la gauche que les dépenses obligatoires des collectivités sont aujourd’hui fixées par la loi.
M. le Ministre délégué - Et c’est grâce à la droite qu’elles auront l’autonomie financière !
M. René Dosière - Avant 1981, en effet, les gouvernements ne cessaient d’imposer aux collectivités des charges obligatoires sans que personne n’en ait connaissance. Le progrès accompli en 1982 était cependant limité car, même non prévue par la loi, cette accumulation de dépenses obligatoires se faisait au détriment de l’autonomie de gestion. Imaginons, par exemple que la loi dispose désormais dans les cantines de collectivités locales, l’achat de saint-nectaire soit désormais une dépense obligatoire. (Exclamations et rires sur de nombreux bancs)
M. André Chassaigne - Plutôt de fourme d’Ambert !
M. le Ministre délégué - Pourquoi pas de brie de Meaux ?
M. Didier Migaud - Ou de saint-marcellin !
M. Jean-Pierre Balligand - De maroilles !
M. le Président - Cessez, sans quoi nous devons parler du Chaource…
M. René Dosière - En tout cas, les collectivités seraient obligées de s’y soumettre. Aussi l’amendement de M. Chassaigne mérite-t-il considération.
L’amendement 39, mis aux voix, n’est pas adopté.
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EXPLICATIONS DE VOTE
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M. André Chassaigne - On dit des Auvergnats qu’ils regardent toujours le bas de l’addition (Sourires), et en bon Auvergnat, je le regarde en me demandant si la libre administration des collectivités territoriales sera renforcée ou amoindrie par ce texte. Les communes, les départements, les régions, pourront-elles mener leurs propres politiques ? Non, à l’évidence.
En cette période du festival d’Avignon, je pense à Jean Vilar, qui disait qu’au théâtre, l’habit fait le moine. Et vous croyez, de votre côté, qu’une loi bien habillée suffira à faire une bonne politique. Mais c’est faux. Votre loi, en réalité, masque l’alourdissement prochain des charges des collectivités, suite aux transferts de compétence que vous voulez nous faire accepter, mais que vous ne saurez pas compenser.
Pour ces raisons, nous voterons contre ce texte.
L’ensemble du projet de loi organique, mis aux voix, est adopté.
M. le Ministre délégué - Au nom du Gouvernement, je voudrais remercier l’ensemble des députés, qui, sur tous les bancs, ont contribué par leur assiduité, à enrichir ce débat, même si tous les amendements n’ont pas été retenus.
Merci au rapporteur, M.Geoffroy, et au président de la commission des lois, pour leur remarquable travail. Merci également aux collaborateurs de la commission, de la DGCL et de mon cabinet.
L’adoption d’une loi, après tant de travail, est toujours un moment d’émotion, malgré les difficultés rencontrées (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP).
Prochaine séance demain matin, jeudi 22 juillet, à 9 heures 30.
La séance est levée à 23 heures 50.