18-04-2007

Aciéries des Ancizes

Monsieur le Ministre,

Je souhaite attirer votre attention sur le cas des aciéries Aubert et Duval sur la commune des Ancizes dans le Puy-de-Dôme.

Depuis 2003, les salariés et leur syndicat CGT ont engagé un combat sans relâche pour obtenir que ce site soit enfin inscrit sur la liste des établissements ouvrant droit au dispositif de cessation anticipée d’activité des « travailleurs de l’amiante ». Cette action en faveur d’une reconnaissance trop longtemps dissimulée est une démarche qui s’inscrit dans une volonté parfaitement légitime de faire valoir le droit des salariés victimes d’une activité prolongée au contact de l’amiante et dont la santé est désormais gravement atteinte.
A ce titre, un rapport de 5000 pages, réalisé en 2005, dresse un bilan accablant des méfaits causés par ce produit hautement cancérigène sur la santé des salariés du site des Ancizes. Ainsi, 209 d’entre-eux sont atteints de « plaques pleurales » ou « d’épaississements pleuraux », 13 sont décés pour cause de mésothéliomes ou cancers broncho-pulmonaires.

Le 7 février 2005, cette situation humainement dramatique a conduit le syndicat CGT à solliciter le classement de cet établissement par votre ministère qui a rejeté cette demande. Le 24 décembre 2006, après renvoi en Conseil d’Etat, le Tribunal Administratif de Clermont-Ferrand a annulé votre décision en vous enjoignant de la réexaminer dans un délai de deux mois. Le 11 janvier 2007, confortant le jugement du Tribunal Administratif, le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Clermont-Ferrand reconnaissait la faute inexcusable de la société Aubert & Duval pour neuf de ses salariés.

La procédure engagée s’appuyant désormais sur plusieurs décisions de justice favorables à la revendication portée par le syndicat CGT, il est particulièrement choquant de constater l’obstination dans laquelle s’enferme votre ministère qui, en date du 24 janvier 2007, a décidé de faire appel de ces décisions devant la Cour d’Appel Administrative de Lyon plutôt que de réexaminer la demande. Le 2 mars 2007, vous avez notifié un nouveau refus de classement du site au prétexte que le calorifugeage effectué n’était pas régulier. Or, personne ne peut ignorer que la production d’acier était impossible sans amiante, systématiquement utilisée pour le calorifugeage des installations et des fours, mais aussi des portes, des brûleurs et des tuyaux… jusque dans les gants, et cela jours et nuits !

Vous n’ignorez pas l’émotion bien compréhensible que suscite votre décision parmi ces salariés meurtris. Au-delà, la population partage cette souffrance, mais aussi les espoirs de voir enfin la reconnaissance prendre le pas sur l’indifférence, voire le mépris, subie depuis de si longues années par ces salariés, malgré l’engagement décisif qui a été le leur pour construire la renommée de leur entreprise.
C’est la dignité de toute une population qui est en jeu dans une région de longue tradition ouvrière qui, de plus, est aujourd’hui accablée par la dégradation ininterrompue de l’emploi et des services publics. C’est bien sûr l’image d’une entreprise inscrite dans le patrimoine local mais aussi celle d’un grand groupe, Eramet, qui seraient frappées d’un lourd discrédit si l’inscription revendiquée de cette usine ne se concrétisait pas.

En conclusion, c’est avec gravité et solennité, que je sollicité de vous un réexamen de ce dossier douloureux afin d’aboutir à l’inscription tant attendue de cette usine comme « site ayant exposé ses salariés à l’amiante » afin que ces derniers bénéficient d’une cessation anticipée de leur activité, amplement méritée.

Avec mes remerciements anticipés, je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, en l’expression de ma haute considération.

Pour en savoir plus : suivi / Eric Dubourgnoux

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