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LOI DE FINANCES POUR 2005 -deuxième partie- (suite)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 2005.
TOURISME
M. le Président - Nous abordons l’examen des crédits du ministère délégué au tourisme.
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M. Léonce Deprez - L’économie touristique est une chance de développement que la France doit saisir en ce nouveau siècle. Elle impose un effort de mise en valeur à la fois des territoires sur lesquels les touristes séjournent et du temps de vie durant ces séjours de Français et d’étrangers. Qui gère ces territoires et en détermine la qualité de vie, sinon les communes ? En première ligne se trouvent donc 2 280 d’entre elles, qui disposent d’hébergements touristiques et qui, pour les mettre à profit, supportent les charges liées à l’accueil de la clientèle. Des stations thermales, littorales ou de montagne aux villes d’art et d’histoire ou de congrès, la diversité de l’offre fait la chance de la France. Le premier devoir de l’Etat est donc de soutenir la fonction économique de ces communes, et désormais durant les quatre saisons de l’année : le temps libre, qui se distingue maintenant des vacances, se répartit désormais sur les douze mois de l’année, et génère le temps de travail des professionnels du tourisme.
La loi sur les libertés locales a fort heureusement maintenu la responsabilité de la conduite de la politique du tourisme au niveau ministériel. L’Etat doit ensuite reconnaître les compétences exercées par les communes, qui gèrent leur territoire. Il doit stimuler leur rôle dans la croissance économique par un agrément, tandis que les comités départementaux et régionaux de tourisme favorisent leur promotion. La loi sur le développement rural, elle, a rappelé, fort heureusement encore, l’existence des communes touristiques répertoriées au ministère de l’intérieur et dont les 510 stations classées sont le niveau d’excellence - et une chance pour la France.
Ce texte comporte des mesures fiscales incitatives pour la rénovation des résidences de tourisme. Il précise également que dorénavant l’Etat fixe la liste des communes touristiques par décret, celles-ci étant ensuite agréées par le ministère du tourisme en fonction de critères relatifs à leurs capacités d’hébergement, fixés dans le passé par le ministère de l’intérieur. Il faudra bien sûr, par souci d’équité, permettre à toutes les communes qui ont consenti les efforts d’aménagement et d’hébergement nécessaires d’accéder à cette liste des communes agréées, bloquée depuis la réformette de la DGF intervenue en 1993, sans que l’on ait pris conscience de la chance que représente l’économie touristique pour le développement économique et l’emploi.
M. André Chassaigne - Tout à fait.
M. Léonce Deprez - La réforme de l’organisation des forces de sécurité - police, gendarmerie, CRS… - doit tenir compte des affluences momentanées dans les communes touristiques et les stations classées. Ainsi les 30 et 31 octobre dernier, 80 000 à 150 000 personnes étaient-elles réunies dans une station balnéaire de la Côte d’Opale, que vous avez visitée, Monsieur le ministre. Or, il ne saurait y avoir de vacances ni de temps libre sereins sans sécurité.
Le travail dominical étant indispensable dans les communes touristiques, la dérogation au droit commun autorisant ce travail doit être officialisée dans les communes touristiques, aujourd’hui répertoriées par le ministère de l’intérieur, demain agréées par le ministère du tourisme. Employeurs et salariés de ces communes ne doivent plus voir leur sort conditionné à une autorisation préfectorale.
En matière de tourisme, la croissance provient d’abord des investissements publics réalisés dans les 2 280 communes touristiques et les 510 stations classées de notre pays, car ce sont eux qui attirent ensuite les investissements privés. S’il convient d’encourager la création d’EPIC pour parvenir à la plus totale transparence comptable, il faut aider les collectivités à investir en leur permettant de récupérer la TVA sur les équipements touristiques qu’elles créent et mettent à disposition de ces EPIC. Ces investissements ne peuvent en effet pas être rentables immédiatement.
Enfin, il est du devoir de l’Etat, comme des régions et des départements, de relier les pôles territoriaux d’économie touristique, d’une part entre eux, d’autre part aux métropoles régionales et nationales, par les liaisons routières, ferroviaires, fluviales et aériennes nécessaires. Le développement de l’économie touristique fait partie intégrante d’une politique volontariste d’aménagement du territoire.
J’ai tenu, en tant que président du groupe d’études Tourisme de l’Assemblée nationale, à insister sur ces six points dont nous demandons au Gouvernement de faire les bases d’une véritable économie touristique. L’essentiel est de comprendre qu’il s’agit d’une économie partenariale qui, associant sur un même territoire acteurs publics et acteurs privés, peut assurer une croissance économique et des emplois durables. Je déposerai d’ailleurs une proposition de loi en ce sens.
Vous avez, Monsieur le ministre, amorcé en 2004 une politique interministérielle du tourisme. Vous souhaitez aller plus loin en 2005. Nous vous y aiderons. Et c’est dans l’espoir de parvenir à une politique touristique à la fois plus volontariste et plus « territorialisée », selon l’expression chère à M. Raffarin, que nous soutiendrons votre projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)
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M. André Chassaigne - La loi de finances pour 2005 n’a visiblement qu’un objectif : résoudre les soucis de fortune de vos mandants. Et ce projet de budget est socialement aussi injuste que le reste de la loi de finances.
Jugement sévère, me direz-vous, d’autant que ce budget est l’un des seuls qui augmente, en progression de 2,8% par rapport à l’an passé. Mais il vous sera difficile de nous cacher que cette hausse de deux millions d’euros servira à financer le déménagement, par ailleurs légitime, du ministère. Les crédits du tourisme proprement dit, inchangés par rapport à 2004, régressent donc si l’on tient compte de l’inflation de 2%. Le diagnostic est sans appel : ce Gouvernement a abandonné toute ambition politique en matière de tourisme.
S’il a finalement reculé sur son projet de décentralisation des procédures de classement et d’agrément des stations touristiques, ce dont nous nous félicitons, il a eu l’outrecuidance de demander une seconde délibération pour contraindre la représentation nationale à repousser un excellent amendement déposé par notre collègue Bouvard en première partie du projet de loi de finances, et visant à favoriser l’extension des chèques-vacances dans les PME. Quel dommage ! Cela est d’autant plus inquiétant que le Gouvernement entretient le doute sur l’avenir de l’Agence nationale du chèque-vacance, n’excluant pas son éventuelle privatisation. L’ANCV aide pourtant un grand nombre de personnes modestes à partir en vacances et ses aides à l’investissement sont précieuses pour le tourisme social.
Une fois encore, l’Etat n’honore pas sa parole : les crédits de paiement des contrats de plan Etat-région ne représenteront que les deux tiers des autorisations de programme. Il continue de se défausser sur les collectivités territoriales.
La saison touristique n’avait pas été bonne l’an passé. Elle ne l’a pas été non plus cette année. Au-delà des aléas climatiques, le secteur touristique pâtit surtout de la baisse du pouvoir d’achat des Français, consécutive à la rigueur salariale prônée par le Gouvernement. Plus fondamentalement, les professionnels du tourisme font les frais du choix de favoriser le développement du tourisme étranger de luxe au détriment du tourisme social. Ce choix contribue pourtant à fragiliser le secteur tout entier, en renforçant sa dépendance à l’égard de la conjoncture économique internationale, de l’évolution des taux de change, des effets de mode et de la situation géopolitique mondiale. Il fait également fi des 24 millions de français qui, aujourd’hui, n’ont pas les moyens de partir en vacances au moins une fois dans l’année. Que les crédits du tourisme social diminuent de moitié par rapport à 2004, et même des deux tiers par rapport à 2003, en dit long de votre politique de classe. Deux millions d’euros pour le tourisme social, trente et un pour la promotion de l’image de la France à l’étranger ! Les chiffres parlent d’eux-mêmes. C’est une double faute. D’une part, parce que le riche touriste étranger ne peut par nature être fidélisé, si bien qu’il faudra toujours dépenser davantage pour l’attirer. C’est d’autre part oublier que le tourisme en France s’est développé grâce aux acquis sociaux et à la reconnaissance du droit aux vacances pour tous. Les crédits autrefois affectés au financement des vacances de nos concitoyens les plus pauvres seront désormais dépensés en campagnes de promotion à l’étranger, et sans doute en petits fours. Mais quelle image de notre pays comptez-vous vendre aux riches Américains ? La Maison de la France communiquera-t-elle sur ces enfants qui se morfondent dans leur cité ou leur village l’été et auxquels vous dites clairement, par ce budget, que les vacances, ce n’est pas pour eux ?
La France est belle quand elle est fraternelle et elle donne d’elle-même une bonne image à l’étranger quand elle se conforme aux idéaux qu’elle proclame. Quand, au contraire, on se satisfait de servir les intérêts d’une classe, on abîme cette image et vous ne serez donc pas étonné, Monsieur le ministre, que les députés communistes et républicains rejettent avec la plus grande vigueur votre budget.
M. Léon Bertrand, ministre délégué au tourisme - Permettez-moi tout d’abord de remercier le rapporteur spécial de la commission des finances, M. Augustin Bonrepaux, et le rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques, M. Jean-Michel Couve, pour la qualité de leurs travaux.
Conformément aux engagements pris lors des Comités interministériels du tourisme de 2003 et 2004, le Gouvernement a prêté, cette année, une attention particulière au budget du Ministère du tourisme. Deux millions ont été affectés en loi de finances rectificative pour financer les mesures du CIT du 23 juillet dernier, ce qui porte le budget, pour 2005, à 74,6 millions en moyens de paiement, soit une hausse de 6,38% par rapport au budget initial de 2004.
Ce budget est un budget de rupture : plutôt que de nous congratuler, à l’instar de nos prédécesseurs, nous nous sommes penchés sur les évolutions de l’industrie touristique. « Dans les dix ans à venir, le monde du tourisme changera plus qu’au cours des dernières décennies » proclamait Bill Gates, un homme qui a su anticiper les récentes mutations économiques !
Nouveaux clients, nouvelles destinations, nouveaux modes de distribution : il n’est que temps de défendre notre position sur le marché mondial. Si la France était encore en 2003 le pays le plus visité, avec 75 millions de touristes, elle doit affronter une concurrence exponentielle et exacerbée. En vingt ans, nous sommes passés de 50 à plus de 580 destinations identifiées !
La première priorité de ce budget est de promouvoir l’image touristique de la France. A cette fin, les équipes de Maison de la France ont bâti une nouvelle stratégie marketing, que j’ai présentée aux adhérents le 27 septembre dernier. Nous sommes les premiers en Europe à nous adapter aux nouvelles formes de tourisme, et notamment au raccourcissement des séjours.
Je me suis fixé l’objectif ambitieux d’engranger 40 milliards de recettes en 2010 contre 32 aujourd’hui. Nous devrons pour cela hiérarchiser nos priorités, concentrer nos moyens sur les secteurs les plus rémunérateurs, comme le tourisme d’affaire ou le tourisme culturel, privilégier certaines cibles tels les seniors ou les jeunes urbains, et attirer la clientèle à fort pouvoir d’achat - je pense aux Japonais, aux Russes, aux Américains…
Cette politique suppose d’investir d’importants moyens dans la communication, aussi le budget de Maison de la France a-t-il été porté cette année à 30,3 millions d’euros, soit une hausse de 3,41% par rapport à 2004.
Mais il faut aller plus loin, en adaptant nos équipements, nos prestations et nos services aux exigences de cette clientèle. C’est la deuxième priorité de ce budget. Par le Plan Qualité France, nous travaillons à la modernisation de nos structures et à la professionnalisation des acteurs.
Grâce à une labellisation des sites les plus performants, mes services accompagnent les professionnels qui s’engagent dans cette démarche. C’est là une mesure phare du CIT du 23 juillet 2004, à laquelle nous consacrons 1,7 million. Nous signerons les premières conventions lors des deuxièmes assises nationales du tourisme, le 1er décembre prochain.
Nous avons la volonté d’être davantage à l’écoute des professionnels, rompant ainsi avec l’inertie qui a largement prévalu jusqu’en 2002.
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M. André Chassaigne - Vous êtes bien sévère !
M. le Ministre délégué - Lors du CIT du 23 juillet dernier, j’ai présenté plusieurs dispositions pour aider les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration. Comment 50 000 offres d’emplois peuvent-elles ne pas être pourvues ? Nous expérimenterons en 2005 un projet de groupement d’employeurs entre trois départements littoraux et trois départements de montagne pour garantir à des saisonniers une embauche pérenne sur deux saisons au moins. Mais encore faut-il que les candidats puissent se loger ! Nous proposons donc d’adapter le 1% patronal, de créer un bail d’un mois reconductible, ou encore de financer deux nouvelles Maisons des Saisonniers.
Je rappelle encore que le CIT du 9 septembre 2003 a prévu de réserver 15% des logements aux saisonniers, contre des exonérations fiscales pour la rénovation de résidences de tourisme dans les stations classées et les communes touristiques. Cette disposition figure dans le projet de loi sur le développement des territoires ruraux.
Autre secteur professionnel que nous accompagnons : les agences de voyage, confrontées au 1er avril 2005 à la fin du commissionnement par Air France. Un audit aidera la profession à se réorganiser et nous allons financer une campagne de promotion vers le grand public.
Dans un monde qui se réorganise, nous ne pouvons rester immobiles. Au 1er janvier 2005 l’AFIT, l’ONT et le SEATM fusionneront au sein d’un GIP unique, mais je vous garantis que les missions de service public du SEATM seront maintenues au sein du nouveau GIP. Les communes de montagne accéderont toujours gratuitement à certaines prestations, comme l’instruction des projets d’Unité touristique nouvelle.
Autre bonne nouvelle : les DRT continueront d’assurer leurs missions, en étroite coopération avec les CDT et les CRT.
Enfin, nous devons favoriser les vacances pour tous, et cet objectif s’inscrit dans la politique de cohésion sociale, qui implique plusieurs départements ministériels.
Nous disposons de deux outils : l’ANCV, qui permet, grâce à la diffusion des chèques vacances, à 6 millions de personnes de bénéficier d’une aide au départ, et la BSV qui propose des séjours à prix réduits aux personnes en difficulté - 55 000 en 2003.
Il n’est pas question de privatiser l’ANCV, mais d’élargir la diffusion des chèques vacances, notamment aux entreprises de moins de 50 salariés, et d’améliorer l’intervention de l’Etat dans le tourisme social. Il a été décidé d’engager une réflexion globale sur ce sujet lors du dernier CIT, et le secrétaire d’Etat au budget a annoncé qu’un groupe de travail serait prochainement réuni. Je suivrai ce chantier avec attention.
Par ailleurs, je confirme que la politique de consolidation des hébergements de tourisme social n’est pas abandonnée. C’est dans un souci de bonne gestion et de réorganisation du pôle social, qu’il a été convenu d’affecter les excédents dégagés chaque année par l’ANCV - 10 millions pour 2003 - à la politique d’aide à la pierre. Il est choquant que, dans un contexte de maîtrise des dépenses publiques, des fonds de réserve restent inutilisés.
Je signale que 1,34 million viendront soutenir l’an prochain l’action des collectivités territoriales, des professionnels et des organismes caritatifs en faveur du tourisme des personnes handicapées, des jeunes, des exclus et des seniors. L’accès aux vacances reste l’une des priorités du Gouvernement, mais son financement doit être rationalisé pour permettre à tous d’en retirer le meilleur profit.
Le tourisme représente un gisement potentiel d’emplois exceptionnel. Selon le conseil d’analyse économique, 1,5 million d’emplois pourraient être créés dans le secteur de l’hôtellerie et de la restauration, d’où l’importance d’augmenter nos budgets de promotion, car un euro investi en rapporte 600 en recettes diverses !
Le tourisme n’a pas fini de peser dans l’économie mondiale, du fait du boom des retraites, du développement de la société des loisirs, de l’émergence de marchés comme l’Inde, la Russie ou la Chine.
J’espère vous avoir convaincus de la nécessité de développer l’attractivité de notre territoire.
Permettez-moi à présent de répondre à vos interventions.
Michel Bouvard s’est inquiété du devenir du SEATM au sein du nouveau GIP, mais, je le rappelle, il conservera ses anciennes attributions, et un département sera même consacré exclusivement à la montagne au sein de ce nouveau pôle.
S’agissant du dispositif de réhabilitation du parc immobilier privé, il n’a pas fait ses preuves, aussi allons-nous mener des expérimentations en vue de l’améliorer. Nous devons trouver un outil plus efficace qui permette aux zones qui en ont besoin de s’équiper pour accueillir le tourisme de demain.
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Beaucoup pensent que l’Etat se défausse en utilisant les excédents de l’ANCV. Or, il s’agit d’un établissement public industriel et commercial qui n’est que le prolongement de l’Etat. Quand la conjoncture est difficile, il serait presque malsain de laisser dormir des fonds. Nous préférons les consacrer à l’action sociale. Ces excédents seront affectés dans le cadre d’une loi de finances rectificative. Nous l’avons déjà fait pour financer certaines mesures du comité interministériel ; nous le ferons pour que la ligne budgétaire du tourisme social soit de nouveau abondée. Nous sommes en discussion avec Nicolas Sarkozy et Dominique Bussereau et je peux affirmer que cette ligne sera abondée en autorisations de programme et que les crédits de paiement nous permettront de poursuivre notre action. Comme le soulignait M. Lejeune, il nous reste à trouver l’astuce qui permette, à partir de l’argent versé par un EPIC, de lever les financements des collectivités territoriales et de l’Europe.
Je comprends l’inquiétude de certains sur la DGF et la définition du potentiel fiscal. Monsieur Deprez, le financement de l’économie touristique constitue encore un vrai chantier. Il nous faut identifier l’activité que nous voulons financer. Il existe en outre d’autres leviers, comme la taxe de séjour. Nous avons besoin d’une vision d’ensemble.
M. Dufau a critiqué mon budget et évoqué les mauvais résultats de la dernière saison. Heureusement, nous réagissons. Deux comités interministériels, des assises nationales, le plan « qualité France », la définition d’une stratégie marketing : il n’y avait pas eu une telle réflexion depuis plus de vingt ans. Nous devrions ainsi sortir de notre léthargie, mais il faut du temps pour recueillir les premiers dividendes de ces efforts. En tout cas, nous n’avons pas à rougir de notre action.
S’agissant du tourisme social, nous n’avons aucune volonté de privatisation. Malgré l’absence momentanée de crédits, le Gouvernement n’a pas réduit l’action sociale. Ainsi, je vais délivrer le millième label « Tourisme et handicap » cette année. De même, avec l’UNAT, nous faisons partir des seniors en vacances (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Vous n’avez pas le monopole du cœur.
M. Launay a annoncé la mort du ministère. Il n’en est pas question, après tous les efforts que je viens de décrire. La LOLF a même consolidé l’existence du ministère en prévoyant un programme « Tourisme ». Plus que jamais, la France a conscience qu’il faut soutenir son économie touristique.
Je veux rectifier ce qu’a dit Mme Pérol-Dumont : le tourisme représente, non pas 5 %, mais 6,6 % du PIB. L’engagement de l’Etat ne se limite pas à mon budget. Madame la députée, vous avez évoqué un vrai problème : les crédits des contrats de plan. Mais il faut dire la vérité : il s’agit d’un problème global. On ne peut réformer les retraites, réduire l’endettement et respecter le Pacte de stabilité sans consentir les efforts nécessaires. L’Etat a pris des engagements, ils seront respectés. Avec les délégués généraux au tourisme, nous allons rencontrer sur le terrain les professionnels en difficulté.
Vous avez parlé d’une dégradation de l’action sociale ; il n’en est rien. En 2002, il y a eu 25 000 BSV. Il y en a eu 39 000 en 2003 et 40 000 en 2004. C’est dire que le mouvement se poursuit et s’amplifie.
Augustin Bonrepaux, qui connaît bien la question, a évoqué les mauvais résultats de la saison ainsi que leurs causes. Sur l’existence même de mon ministère, je sais, Monsieur le député, que vous n’exprimiez pas votre pensée mais que vous vous faisiez l’écho de votre commission. Comme je l’ai déjà dit, la LOLF a conforté mon ministère, qui ne va pas disparaître.
M. Couve a rappelé que le tourisme ne va pas de soi. Longtemps, on a cru qu’il se développerait spontanément parce que la France est belle… Or de nouvelles destinations touristiques apparaissent, la concurrence est farouche, nous devons réagir et la France a plus que jamais besoin d’un ministère du tourisme.
Sur l’application de la loi littoral, vous avez rappelé à juste titre que les élus auront besoin d’assistance. Je suis prêt à étudier vos propositions. J’ai appris qu’une mission vous a été confiée par le président de la commission des affaires économiques : mon ministère est prêt à travailler avec vous de manière à en exploiter le mieux possible les résultats.
Claude Leteurtre a évoqué la nécessité de sensibiliser les ambassadeurs. Ce fut une de mes premières actions : j’ai fait en sorte d’être entendu lors de la conférence des ambassadeurs. Nos postes diplomatiques deviennent de plus en plus les relais de notre politique du tourisme.
Les moyens de l’administration centrale n’augmentent que de manière apparente, la LOLF nous faisant obligation d’identifier au niveau du ministère des dépenses auparavant comptabilisées dans d’autres départements.
L’investissement touristique a d’autres sources que le budget de mon ministère.
Léonce Deprez a évoqué la territorialisation de l’économie touristique. Je partage son point de vue et je pense comme lui qu’il appartient à l’Etat de délivrer l’agrément aux communes touristiques. Nous avons plusieurs fois évoqué l’idée d’une loi qui structure l’activité touristique. Nous avons créé un groupe de travail sur les stations classées au sein duquel, Monsieur le député, vous jouerez un rôle prépondérant. Cela nous donnera l’occasion d’avancer.
Vous avez également évoqué les questions de la sécurité dans les grands pôles touristiques ainsi que de l’ouverture dominicale des commerces. Je partage entièrement votre point de vue et je m’engage à discuter sur l’un et l’autre sujets avec les ministres concernés. Comme vous, je pense que l’économie touristique doit être fondée sur le « PPP », le partenariat public-privé. En effet, si les pouvoirs publics ne créent pas les conditions nécessaires à l’investissement privé, nous ne réussirons pas à développer notre économie.
M. André Chassaigne a voulu faire croire que la seule dépense extraordinaire de ce budget était liée au déménagement du ministère du tourisme Place de Catalogne. Outre que ce déménagement nous permettra d’être plus efficaces…
M. André Chassaigne - Je n’ai jamais dit le contraire.
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M. le Ministre délégué - …nous réaliserons ainsi des économies.
J’ajoute que l’ANCV ne sera pas privatisée.
Mais vous avez surtout fait preuve de démagogie…
M. André Chassaigne - Non !
M. le Ministre délégué - …en opposant la promotion du tourisme de luxe et le tourisme social. Le tourisme de luxe doit être également promu si l’on veut des devises, donc des recettes, donc des emplois. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)
Je remercie M. Lejeune pour ses propos sur la stratégie marketing. L’équipe « Maison de la France » a réalisé en effet un travail important qui nous permettra de conserver notre place de première destination au monde mais aussi de gagner des parts de marché.
Concernant le tourisme social, nous devons évidemment disposer de moyens financiers mais il importe avant tout qu’ils proviennent de l’Etat afin que ce dernier puisse continuer à jouer son rôle moteur.
Je remercie M. Houssin de l’intérêt qu’il a montré pour la promotion touristique, d’autant plus importante que la concurrence est très rude. Il importe également de perfectionner l’accueil de la clientèle. Concernant les résidences hôtelières, vous avez raison : un encadrement juridique plus précis s’impose. La seule application du plan Qualité France nous amènera à discuter avec les professionnels en vue d’élaborer ensemble une solution. Enfin, les chambres d’hôtes doivent être mieux classées. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)
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M. le Ministre délégué - Les discussions sont en cours avec MM. Sarkozy et Bussereau pour que les excédents dégagés par l’ANCV puissent abonder la ligne de l’hébergement du tourisme social, tant en autorisations de programme qu’en crédits de paiement. Nous espérons obtenir deux millions. Nous sommes conscients qu’outre l’aspect social de la question, c’est l’aménagement du territoire et le développement local de certains zones qui sont en jeu. Ces opérations sont aussi une façon de lutter contre la hausse des prix, puisque les équipements bénéficiant d’une aide publique proposent des tarifs modérés. Nous trouverons probablement une solution en loi de finances rectificative. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)
M. André Chassaigne - Monsieur le ministre, nous vous remercionsd’avoir répondu de façon aussi scrupuleuse. Je vous demanderai toutefois encore quelques précisions sur le soutien aux communes touristiques. Jusqu’en 1993, les communes et stations classées touristiques bénéficiaient de dotations au titre des charges inhérentes à la fréquentation touristique, qui ont depuis été intégrées au sein de la dotation globale de fonctionnement. Mais les communes qui ont engagé leur développement touristique après cette date ne perçoivent aucune dotation alors qu’elles supportent elles aussi de lourdes charges ! Or il s’agit souvent de communes rurales, dont la survie dépend en grande partie de l’économie touristique.
Par ailleurs, le projet de loi de finances intègre une nouvelle réforme de la DGF. Encore simplifiée, elle ne devrait plus reposer à terme que sur des critères de population et de superficie. Nous avons toutes les raisons de craindre que les communes à vocation touristique en fassent les frais, car si les variations de population sont censées être prises en compte, rien n’est dit spécifiquement pour les communes à vocation touristique ! Le Gouvernement a-t-il prévu un dispositif permettant de couvrir une partie des charges dues à une activité touristique pour toutes les communes concernées ?
M. le Ministre délégué - La question est complexe. D’abord, l’écart se creuse entre les communes dont la dotation a été intégrée dans la DGF et celles qui se sont mises récemment au tourisme. Ensuite, la taxe de séjour, l’autre recette qu’elles perçoivent, n’est pas bien assise. Il semble que beaucoup bénéficient des recettes générées par quelques uns. Toute une réflexion doit donc être menée, que j’ai engagée avec le ministre de l’intérieur. Le problème de la dotation ne peut en tout état de cause être dissocié de celui de la taxe de séjour, et je vous assure que je suis ce dossier de très près.
M. André Chassaigne - Je voudrais également revenir sur la situation de l’agence nationale des chèques-vacances, établissement public qui permet chaque année à plus de deux millions et demi de salariés de partir en vacances à moindres frais. Les chèques-vacances constituent une aide sociale, mais contribuent également au développement de l’économie nationale : en 2004, ils généreront plus de quatre milliards d’euros de recettes touristiques !
Cette utilité pourrait encore être renforcée s’ils étaient étendus aux salariés, mesure à laquelle votre Gouvernement s’est clairement opposé.
M. le Rapporteur pour avis - C’était votre gouvernement !
M. André Chassaigne - Non ! Je parle de l’amendement de M. Bouvard qui a été repoussé aux calendes grecques.
Récemment, l’ANCV a externalisé le service chargé de la lecture des chèques, qui avait pourtant été internalisé en 1998 à la demande répétée de la Cour des comptes. Il semble également qu’une dizaine de procédures de licenciement soient en cours à l’Agence, officiellement pour faute ; un syndicaliste semble même menacé. Pourrait-il s’agir d’une stratégie de déstabilisation de l’agence, alors que la presse nationale a évoqué des projets de changement de statut de l’ANCV et même de privatisation, en faveur de certains groupes de l’hôtellerie et de la restauration ? Je crains que le projet de loi sur le tourisme que vous avez annoncé, Monsieur le ministre, ne soit l’occasion de ce changement de statut des chèques-vacances. Soutenez-vous la privatisation rampante de l’ANCV, par démembrements successifs ? Allez-vous porter, ce faisant, le coup de grâce au tourisme social ? Quelles garanties donnez-vous du maintien du caractère public et social des missions de l’ANCV ?
M. le Ministre délégué - Soyons clair : aucune privatisation n’est prévue. L’externalisation du traitement des chèques ne vise qu’à rendre l’agence plus efficace, donc à lui permettre de mieux remplir sa vocation sociale. En ce qui concerne les entreprises de moins de 50 salariés, l’amendement n’est pas passé, certes, mais M. Bussereau a pris l’engagement de reprendre la discussion de façon plus sereine avec Michel Bouvard. Il n’est pas possible d’assumer si vite une dépense de 430 millions : trouvons une solution plus progressive ! Mais l’objectif est bien d’étendre le bénéfice des chèques-vacances à ces salariés. Quant aux licenciements, je vous assure qu’ils n’ont rien à voir avec un prétendu plan social. L’administration applique des règles, et il est normal que les procédures adéquates soient engagées lorsqu’elles ne sont pas suivies. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP)
M. le Président - Les crédits du tourisme seront mis aux voix à la suite des crédits sur l’aménagement du territoire.
Prochaine séance, ce soir, à 21 heures 30.
La séance est levée à 18 heures 45.