04-12-2002

POUR une nouvelle politique agricole d’installation agricole

S’il est un vrai problème pour nos communes rurales, c’est bien la reprise des exploitations agricoles et l’installation de nouveaux agriculteurs.
Chiffres révélateurs : durant les 30 dernières années, la France a perdu 1 million d’exploitations… alors que le nombre de celles de plus de 50 ha a doublé. Cette régression a des conséquences graves pour nos campagnes, en particulier dans les cantons les plus fragilisés, éloignés des zones urbanisées : la disparition des exploitations agricoles alimente bien souvent nos conversations et nourrit l’inquiétude alors qu’il n’existe guère d’alternative économique.
J’ai rappelé cette situation dans mon intervention à l’Assemblée Nationale durant la discussion du budget agricole 2003, dénonçant en particulier la baisse de 8,5 millions de l’enveloppe de la DJA (Dotation aux Jeunes Agriculteurs).
Alain Marleix, députe UMP du Cantal et rapporteur de ce budget, a lui aussi noté la baisse du nombre d’installations (de 15 600 en 1995 à 12 000 environ en 2001) et souligné surtout « que le nombre d’installations aidées est de l’ordre de la moitié des installations totales, ce qui est essentiellement dû aux conditions exigées pour l’obtention de la DJA, en terme de viabilité économique de l’exploitation et de formation notamment » ajoutant en commentaire de ses propos « qu’il serait utile de revoir ces conditions ».
En effet, les fermes trouvent aujourd’hui de plus en plus difficilement des repreneurs au profit de l’agrandissement des exploitations existantes, qui présentent plus de garanties que des candidats à l’installation manquant de capital.
Il s’agit bien là d’une question essentielle : quelles mesures adopter pour maintenir des agriculteurs et par là-même des campagnes vivantes ?
Bien sûr, la première réponse, frappée du bons sens, est de changer la politique agricole européenne en s’attaquant au productivisme au profit d’une agriculture paysanne source d’emplois agricoles, fournissant une nourriture de qualité, avec des techniques préservant l’environnement et maintenant la pérennité de l’agriculture pour les générations à venir.
Mais il faut aussi une nouvelle politique d’installation agricole avec des orientations à même d’arrêter l’hémorragie.

Pour cela, il est temps de se donner de nouvelles priorités :

  • Privilégier impérativement l’installation sur l’agrandissement, en mettant si nécessaire en œuvre des actions de stockage de terres pour créer des réserves.
  • Inciter financièrement les retraités à transmettre leur exploitation à un candidat à l’installation, même hors DJA, ce dernier pouvant bénéficier d’une dotation de carrière s’il ne dispose pas d’un capital de départ suffisant.
  • Favoriser clairement l’installation progressive « hors normes », sur des petites fermes, et en limitant les contraintes de surface, d’âge et de formation, en encourageant notamment le partenariat avec des agriculteurs en activité.
  • Lutter si nécessaire contre les formes d’agriculture « capitaliste » afin d’empêcher les prises de contrôle des fermes par des investisseurs.
    Les Contrats Territoriaux d’Exploitation auraient pu contribuer à développer cette réorientation de la politique d’installation : malheureusement, les choix du nouveau gouvernement, révélés par le budget 2003, ne vont pas dans ce sens, alors que nous avons pourtant là un enjeu capital pour la revitalisation des zones en déprise et le devenir de nos communes de montagne.
    Comme la grande majorité des élus ruraux, je reste persuadé que l’agriculture est l’élément fondamental d’un développement rural durable. Certains départements, comme celui du Puy-de-Dôme, l’ont compris en incitant au maintien du plus grand nombre possible d’exploitations, avec un dispositif d’aides pour soutenir l’installation des jeunes et la création d’activité.
    Le Conseil Général du Puy-de-Dôme s’est également donné les moyens de gérer le foncier sur le long terme. Des outils originaux sont mis à la disposition des communautés de communes pour faciliter l’arrivée de nouveaux agriculteurs et l’agrandissement des petites exploitations.
    Un important soutien est par ailleurs apporté aux producteurs et aux filières qui s’engagent dans des démarches de qualité, l’objectif étant de valoriser les nombreuses potentialités de l’agriculture départementale tout en répondant aux attentes du consommateur.
    C’est ce type de politique volontariste, sortant des sentiers battus, que nous souhaiterons voir initier au niveau national avec une réorientation de la Politique Agricole Commune.

André CHASSAIGNE

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