16-03-2006

Parrainage sportif et la loi Evin.

Monsieur André CHASSAIGNE attire l’attention de Monsieur le Ministre de la santé et des solidarités sur les infractions répétées à la loi en matière de publicité des boissons alcoolisées.

Il est clair que les limitations et interdictions se répercutent et pénalisent les recettes publicitaires des supports médias. Avec la loi Evin la presse écrite a connu une baisse considérable de son budget publicitaire. Les manifestations sportives d’envergure ne peuvent plus être sponsorisées par des firmes de tabac ou d’alcool.

La politique de santé reste cependant dominée par l’intérêt commercial. Si la publicité est le principal vecteur de la politique anti-tabac et anti-alcoolisme, le poids des groupes de pression des industries productrices d’alcool représente un frein indiscutable à l’efficacité de cette politique, par ailleurs beaucoup plus sévère pour notre viticulture.

Le 28 mars 1995, un groupe de réflexion interministériel associant les professionnels a adopté un code de bonne conduite visant à résoudre la contradiction entre l’interdiction de publicité pour l’alcool à la télévision (art. L. 17 du CDBMA) et la retransmission télévisée de manifestations sportives se déroulant à l’étranger dans des enceintes sportives comportant des panneaux publicitaires en faveur de boissons alcooliques. En 1994, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) avait en effet relevé, à l’occasion de la retransmission télévisée de matchs de football, la présence de panneaux publicitaires comportant de la promotion en faveur de marques de boissons alcoolisées françaises.
Le CSA a estimé qu’il peut s’agir d’une pratique visant à contourner la loi du 10 janvier 1991, au motif que les alcools pour lesquels de la publicité est faite par affichage sur les stades sont des boissons majoritairement ou exclusivement commercialisées en France.

La Commission européenne a par ailleurs considéré, par décision en date du 19 mars 1997, que l’interdiction de parrainage des manifestations sportives par des fabricants de boissons alcooliques édictée par la loi Évin ne pouvait être jugée incompatible avec le traité de Rome. La protection de la santé des individus justifie en effet la restriction apportée au principe de libre prestation de services au sein de l’Union européenne.

Pourtant, il apparaît, notamment en ce qui concerne une compétition de rugby qui a pour nom la « H CUP » en France, alors que dans d’autres pays il s’agit de la « Heineken Cup », que le nom de cette marque de bière « Heineken » est largement médiatisé, Heineken revendiquant même le titre de sponsor officiel.

C’est pourquoi André CHASSAIGNE demande à Monsieur le Ministre quels sont ses projets pour que la loi soit appliquée.

Réponse du Ministre :

La loi du 10 janvier 1991, dite « loi Evin », codifiée à l’article L. 3323-2 du code de la santé publique, interdit la publicité télévisée directe ou indirecte en faveur des boissons alcoolisées. Un code de bonne conduite, établi par le Conseil supérieur de l’audiovisuel en 1995, définit les modalités d’application de cette interdiction à des retransmissions, en France, de manifestations sportives ayant lieu sur le territoire d’autres États membres. Ce code de bonne conduite distingue entre les événements sportifs multinationaux, dont les images sont retransmises dans un grand nombre de pays et qui ne sont donc pas considérés comme concernant principalement le public français, et les événements sportifs binationaux, dont la retransmission vise spécifiquement le public français.

Le code prévoit que, s’agissant de ces dernières manifestations, les diffuseurs français doivent mettre en œuvre tous les moyens disponibles pour empêcher l’apparition à l’antenne de publicité en faveur des boissons alcoolisées. Par un arrêt en date du 13 juillet 2004, la Cour de justice des communautés européennes a conclu en la compatibilité de cette réglementation française avec le droit communautaire. Dans ce contexte, le Parlement français a veillé à renforcer l’application de ces dispositions. Ainsi, la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique a élargi la possibilité d’ester en justice aux associations de consommateurs et aux associations familiales pour les infractions à la législation en matière de lutte contre l’alcoolisme.

Elle a aussi donné compétence aux agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes pour faire appliquer les règles relatives à la publicité en faveur des boissons alcoolisées. Ces nouvelles dispositions permettent d’élargir le nombre d’acteurs engagées dans la vigilance judiciaire, nécessité qui avait été mise en lumière par l’instance d’évaluation de la loi Evin, sous l’égide du commissariat général du plan, dans son rapport publié en 1999.

Pour en savoir plus : André Chassaigne

P.-S.

Question n° 89795 publiée au JO du 21/03/06
Réponse publiée au JO du 01/08/06.

Imprimer