La séance est ouverte à vingt et une heures trente.
ASSURANCE MALADIE (suite)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d’urgence, du projet de loi relatif à l’assurance maladie.
ART. 4 (suite)
Mme la Présidente - Nous en venons aux amendements identiques 748 à 759 et 6925 à 6939.
M. Gilbert Biessy - L’amendement 748 tend à supprimer le dernier alinéa de cet article par lequel les patients seront contraints de désigner à leur caisse d’assurance maladie un médecin traitant. Si ce n’est pas le médecin habituel qui est consulté, celui-ci pourra augmenter ses honoraires.
Ce système ne sanctionne que les gens modestes qui n’auront pas les moyens d’assumer les frais supplémentaires. Est-ce là l’amélioration de l’accès aux soins prônée par le Gouvernement ?
M. Maxime Gremetz - Par cet article, vous voulez créer un médecin traitant, un médecin référent, un médecin de famille, mais on manque de médecins ! Vous le savez bien, tout est dans cette petite brochure que je garde précieusement, même si on m’en a proposé 1 000 € ! C’est si rare que ça vaut de l’or !
Cet amendement tend à supprimer une disposition qui est non seulement injuste, mais aussi coûteuse, car il faudra consulter, et donc payer, davantage de médecins ! J’aimerais que l’on m’écoute, car sinon, autant aller prêcher à la buvette en buvant du lait-fraise ! Je sais bien que vous sortez d’une petite réunion sympathique, cela se voit à vos visages….
M. Guy Drut - Délit de faciès ! (Sourires)
M. Maxime Gremetz - Contrairement à vos promesses, vous mettez en place une machine à déremboursements ! Ce sont encore les plus modestes que vous sanctionnez : s’ils veulent choisir librement leur médecin, ils devront payer !
M. Yves Bur, président de la commission spéciale - Quelle caricature !
M. Maxime Gremetz - Madame la présidente, voyez de quelle manière il m’insulte !
Mme la Présidente - Le Président a organisé une exposition de caricatures, et ce n’était pas insultant.
M. Maxime Gremetz - Pourquoi obliger un patient à passer par un généraliste avant de s’adresser à un spécialiste ? C’est augmenter les dépenses ! A moins qu’il ne s’agisse de grossir la clientèle des médecins traitants !
Pour toutes ces raisons, nous sommes opposés à cet article.
M. André Chassaigne - Cette disposition pose un problème majeur dans les zones de faible démographie médicale. Elle montre d’ailleurs que vous ne connaissez rien au monde rural (Protestations sur les bancs du groupe UMP). Il y a des zones où l’on ne trouve pas un médecin à vingt kilomètres à la ronde, où il faut appeler plusieurs médecins avant que l’un puisse vous rendre visite, où les tours de garde sont organisés la nuit certes, mais aussi en semaine, ce qui est tout à fait nouveau. Votre projet prouve que vous en êtes restés à une vision dépassée. Il est inapplicable, et je regrette la forme de mépris qu’il traduit envers le milieu rural (Protestations sur les bancs du groupe UMP).
M. Alain Claeys - L’amendement 6926 est défendu.
M. Gérard Bapt - Le 6928 aussi.
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M. Xavier Bertrand, secrétaire d’Etat à l’assurance maladie - La disposition que vous voulez supprimer fait partie intégrante du système que nous voulons mettre en place, et nous l’assumons parfaitement. Il faut délibérément agir en faveur de la coordination des soins. Plus des trois quarts des Français ont aujourd’hui le bon type de comportements. Nous voulons prouver aux autres qu’ils ont intérêt à aller voir un médecin traitant. Vous choisissez votre médecin traitant parce que vous lui faites confiance, qu’il vous écoute et qu’il vous soigne bien. Pourquoi ne vous conseillerait-il pas dans le choix d’un spécialiste ? Nous croyons à l’incitation, et il est de notre devoir de l’utiliser pour faire évoluer les comportements.
Monsieur Chassaigne, cette disposition ne créera aucune pénurie en milieu rural, et ne causera aucun changement. La question de la démographie médicale appelle des réponses qui se trouveront dans le texte sur le développement des territoires ruraux. Avis défavorable.
M. Daniel Paul - Nous sommes favorables à la coordination : nous avons voté un amendement pour l’améliorer. Mais la coordination n’est qu’un prétexte : la logique qui inspire toute votre politique est de faire payer toujours plus les ayants droit. Pour promouvoir la coordination, je crois en les mérites de l’explication : il faut donc supprimer les sanctions financières. Par ailleurs, vous êtes en train de constituer le pactole pour les complémentaires ! Ceux qui ont les moyens de payer seront couverts, moyennant une prime adaptée, dans leur nomadisme médical. Je suis donc prêt à voter l’article quatre si vous supprimez les sanctions financières, et donc excluez la possibilité d’une couverture complémentaire.
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M. le Président de la commission spéciale - …nous ne divergeons que sur les moyens d’y parvenir. Aujourd’hui, 25 à 30 % de nos concitoyens s’adressent directement aux spécialistes : faut-il laisser ce mouvement s’amplifier ou ne devons-nous pas plutôt considérer qu’il faut inciter à consulter en premier un généraliste ? Nous avons opté pour cette seconde attitude, qui nous semble dans l’intérêt des patients et, secondairement, de nature à favoriser une utilisation plus efficace des moyens de la sécurité sociale. Responsabiliser les Français, c’est en définitive les convaincre qu’ils gagneront à cette coordination, qui passe par le médecin traitant !
Monsieur Chassaigne, je veux bien croire qu’un mouvement de désertification s’est engagé mais il n’a pas atteint les proportions que vous dites : nous n’avons jamais eu autant de généralistes et de spécialistes.
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La séance est levée à minuit.