14-10-2004

SCOT, SMVM, fruits et légumes, vins.

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DÉVELOPPEMENT DES TERRITOIRES RURAUX - deuxième lecture - (suite)

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion en deuxième lecture du projet de loi relatif au développement des territoires ruraux.

Mme la Présidente - A la demande du Gouvernement, nous commencerons cette séance par l’examen de l’article 75 sexies.

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M. le Ministre de l’agriculture - Avant de vous présenter l’amendement 335, je voudrais corriger une erreur de rédaction : dans la deuxième phrase, il faut lire l’article L. 122-1 « du code de l’urbanisme » et non « du même code ».

Une réforme du schéma de mise en valeur de la mer a été adoptée en première lecture au Sénat. Un groupe de travail réunissant le Gouvernement et les parlementaires a ensuite permis de simplifier le dispositif. L’amendement 335, rectifié à l’instant, confirme donc le rapprochement entre les SCOT et les SMVM. Les collectivités territoriales peuvent engager un SMVM et l’élaborer conjointement avec le SCOT. Le SMVM sera adopté avec l’accord du préfet. Si les enjeux dépassaient le périmètre d’un SCOT, l’Etat conserverait la possibilité d’engager un SMVM, mais selon une procédure radicalement simplifiée, conduite par le préfet en étroite collaboration avec les collectivités territoriales. L’amendement met par ailleurs les SMVM en cohérence avec la procédure d’approbation du SCOT. Il prévoit enfin que seuls les SMVM dont la procédure d’approbation est engagée, la mise à disposition du public étant déjà réalisée, restent régis par la procédure actuellement en vigueur. A l’heure où sont reconnus les enjeux multiples de notre littoral, il importe de disposer d’outils propices à une gestion intégrée et durable des zones côtières.

M. Yves Coussain, rapporteur - Avis favorable. Il s’agit d’une meilleure rédaction du dispositif qui avait été introduit par le Sénat pour une meilleure articulation entre les SCOT et les SMVM. 

M. André Chassaigne - Je voudrais, en me faisant le porte-parole de François Liberti, poser une question : la bande littorale héraultaise et le bassin de Thau vont-ils servir de cobayes à l’offensive contre la loi littoral ? Le rapport du groupe de travail du Sénat ne vise ni plus ni moins qu’à modifier la loi littoral. On y trouve des mesures telles que le transfert de la gestion du domaine public maritime aux communes, des atteintes à la bande des 100 mètres, la possibilité de privatiser l’exploitation des plages… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) Aujourd’hui, sous prétexte de simplification, il est proposé d’inclure dans les SCOT un volet maritime, en contrepartie de la suppression des schémas de mise en valeur de la mer.

Alors que le texte issu du Sénat précisait que les SCOT sont compatibles, le cas échéant, avec l’élaboration d’un SMVM, l’amendement 335 prévoit, lui, qu’ils se substituent à tout ou partie d’un schéma de mise en valeur de la mer préexistant. Le seul SMVM existant est celui de l’étang de Thau, sur le littoral entre Marseillan et Frontignan. Il est donc directement visé.

Plusieurs députés UMP - Mais non !

M. André Chassaigne - Ce SMVM signé en 1995, après quatre ans d’élaboration, définit une unité géographique et maritime afin d’organiser la cohabitation des activités en concurrence et donne la priorité à la pêche et à la conchyliculture. Opposable aux futurs SCOT, il représente la seule garantie que ces activités restent prioritaires. Demain, sous le couvert d’impératifs économiques, touristiques ou urbanistiques, tout sera possible ! (Exclamations et rires sur les bancs du groupe UMP). Nous assistons à une nouvelle offensive du béton spéculatif contre les activités traditionnelles qui ont besoin d’un espace protégé.

M. Jacques Le Guen - Malgré le sérieux qu’impose le sujet, on ne peut s’empêcher de sourire en entendant parler du retour des bétonneurs ! M. Chassaigne aurait dû prendre le temps de lire les rapports du Sénat et de l’Assemblée. Mais peut-être, habitant le centre de la France, ne connaît-il pas le littoral ?

Cet amendement est particulièrement important : il permettra de régler un certain nombre de difficultés. J’aimerais cependant avoir une précision : l’avis du préfet sur le périmètre du SCOT prévu au paragraphe IV est-il simple ou conforme ? L’enjeu est de savoir s’il s’agit encore d’une décision d’Etat ou si elle est prise par les élus.
M. Léonce Deprez - Nous apprécions souvent les interventions de notre collègue Chassaigne, mais il est indispensable de comprendre qu’il y a un consensus sur tous nos bancs, consensus qui s’est exprimé lors de nos auditions. Nous voulons tous parvenir au même résultat, c’est-à-dire ne pas modifier la loi littoral, votée à l’unanimité en 1986 et qui doit rester le cadre législatif essentiel. Nous avons voulu que cette loi soit interprétée dans un sens constructif, et non négatif, et soit source de développement durable et non de blocage pour le littoral.

En écoutant notre collègue socialiste, j’ai vraiment senti qu’il y avait un accord général. Le Sénat a voté pour un schéma de cohérence territoriale avec un volet de mise en valeur de la mer ; l’Assemblée a conclu dans le même sens, et le Gouvernement a été sensible à nos propositions destinées à sortir de l’impasse tout en respectant la loi. Je souhaite vraiment que ce message passe, y compris au-delà de cette enceinte, et qu’on ne relance pas un conflit qui n’a pas de réalité, alors qu’il existe une volonté commune de respecter la loi tout en l’appliquant de manière constructive.

M. Alain Gouriou - Dans cet amendement les aspects positifs l’emportent largement. Ma circonscription a vu la mise en œuvre de deux SMVM presque contigus. Ce sont des entreprises importantes, qui impliquent la mise à disposition de nombreux services de l’Etat et un travail considérable. Je pense qu’ils sont de nature à garantir le respect de l’esprit du législateur de 1986.

M. le Ministre de l’agriculture - Je veux préciser deux points à M. Liberti, par l’intermédiaire de M. Chassaigne. Tout d’abord la loi littoral n’est en rien modifiée dans sa philosophie ni dans son dispositif. Ensuite, comme l’a dit M. Deprez, dans tous les travaux qui ont trouvé place entre la première lecture au Sénat et la deuxième lecture à l’Assemblée, dans les groupes de travail où étaient représentés tous les groupes parlementaires, la nécessité a été admise de mettre en cohérence schémas de mise en valeur de la mer et schémas de cohérence territoriale. Quand je parle « des » SMVM, par ailleurs, j’exagère puisque aujourd’hui il n’y en a qu’un, celui de Thau. Celui-ci n’est en rien remis en cause par ces dispositions, je veux rassurer totalement M. Liberti sur ce point.

En réponse, enfin, à M. Le Guen, je le dis clairement, et le Journal officiel en fera foi : l’avis du préfet sera un avis simple et non un avis conforme. (Signes d’approbation sur plusieurs bancs du groupe UMP)

L’amendement 335 rectifié, mis aux voix, est adopté.

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M. Jean Dionis du Séjour - J’ai eu l’occasion d’exposer que la crise de la filière fruits et légumes tient pour une part aux rapports entre producteurs et grande distribution. C’est ce qui me conduit à proposer, par l’amendement 521, l’institution d’un coefficient multiplicateur entre le prix d’achat et le prix de vente des fruits et légumes en période de crise. Ainsi définira-t-on une marge raisonnable entre le prix d’achat au producteur et le prix de vente au consommateur. Je n’ai pas la paternité de cette idée, qui est défendue depuis de longues années et qui a fait l’unanimité au sein du groupe « fruits et légumes » des deux Assemblées, ainsi que des organisations professionnelles agricoles de mon département par exemple, le Lot-et-Garonne : c’est en dire le bien-fondé ! Devant une crise aussi grave que celle d’aujourd’hui, il faut faire preuve d’audace. Monsieur le ministre : toute la filière attend votre réponse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF)

M. Yves Coussain, rapporteur - La commission a repoussé cet amendement.

M. François Rochebloine - Pour quel motif ?

M. Jean Dionis du Séjour - Elle n’en a pratiquement pas parlé.

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M. André Chassaigne - Je m’associerai d’autant plus au vote de cet amendement que, plus loin j’en ai déposé un analogue qui tend à la mise en place du mécanisme du coefficient multiplicateur.

M. Antoine Herth - Il s’agit là d’un sujet très important, et je donne acte à M. Dionis du Séjour et au groupe UDF d’avoir engagé le débat. C’est un sujet récurrent depuis quinze ans, mais nous avons aujourd’hui l’engagement du ministre de l’agriculture….

M. François Sauvadet - Cela fait dix ans que les ministres en prennent !

M. Antoine Herth - ….d’avancer sur ce sujet très compliqué en ce qu’il touche au droit commercial. Pour cette raison, le groupe UMP ne votera pas cet amendement, et fera confiance au ministre.

A la majorité de 33 voix contre 21 sur 54 votants et 54 suffrages exprimés, l’amendement 521 n’est pas adopté.

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APRÈS L’ART. 10 SEPTIES

M. le Ministre de l’agriculture - Avant de vous présenter l’amendement 329, je voudrais porter une correction : dans le deuxième alinéa, il s’agit des vins « d’appellation » d’origine contrôlée, et non « à » appellation d’origine contrôlée.

Face aux difficultés rencontrées par la filière vitivinicole sur les marchés d’exportation et à la baisse de la consommation intérieure, des réflexions ont été conduites pour améliorer le positionnement des vins français. L’objectif est de clarifier l’offre viticole française et de favoriser son adaptation à la structure du marché mondial, qu’il serait illusoire de prétendre infléchir. Or, à chaque catégorie de vins correspondent des conditions de production et des pratiques œnologiques spécifiques. L’amendement 329 corrigé permet donc de rendre obligatoire une déclaration d’affectation des parcelles consacrées à la production de vins de pays, comme c’est déjà le cas pour les vins à appellation d’origine, pour améliorer la connaissance et le suivi de la production. En outre, il deviendra possible d’interdire à un viticulteur de revendiquer une même récolte, sur une même parcelle, à la fois en vin de pays et en vin d’appellation d’origine contrôlée. Un décret déterminera le destinataire de la déclaration et sa durée de validité.

M. Yves Coussain, rapporteur - Avis favorable. Nous ne pouvons que nous féliciter de la simplification des démarches administratives.

M. André Chassaigne - Cet amendement est dans la continuité de votre déclaration de juillet sur l’organisation de l’offre française, qui a déclenché des inquiétudes parmi les viticulteurs. Ils voient se dessiner une volonté de réserver les appellations d’origine contrôlée aux très grands crus et de procéder à de nombreuses déclassifications d’AOC en vin de pays pour satisfaire la grande distribution, avec comme conséquence la standardisation de l’offre de vin. Le négoce a en effet fait le choix d’investir en priorité dans les vins du nouveau monde, ce qui conduit à cette standardisation dont les AOC sont victimes. Je relaye ici les inquiétudes des viticulteurs du Bordelais, qui soulignent que la déclassification des AOC les fera entrer non seulement dans la concurrence mondiale, mais exacerbera la concurrence avec d’autres régions françaises, et notamment le Languedoc-Roussillon.

M. le Ministre de l’agriculture - En termes de prix, il n’y a pas de hiérarchie entre AOC et les vins de pays : beaucoup de ces derniers sont vendus plus cher que des AOC. Par ailleurs, la filière vitivinicole est confrontée à la fois à la baisse de la consommation intérieure et à la surproduction mondiale. Enfin, des voix s’élèvent depuis des années dans la filière pour réclamer l’abandon des AOC et donc du lien au terroir. Le Gouvernement n’en a point voulu. Il a donc mené une très large concertation, qui a abouti, en juillet, à une position commune. Il s’agit de mettre à la disposition des viticulteurs une boîte à outils dans laquelle ils sont libres de piocher, aire d’appellation par aire d’appellation. Il existe deux grandes catégories. D’abord, nous réaffirmons la spécificité française des appellations d’origine contrôlée et donc du lien au terroir, résultat de siècles de travail dans nos vignobles. Mais rien n’empêche de modifier certains décrets sur des AOC, qui ne sont peut-être plus adaptés. La deuxième catégorie est celle des vins de pays, qui peuvent publier des informations sur leur cépage ou leur marque commerciale, ce qui répond aux demandes d’un certain nombre de consommateurs en France et à l’exportation.

Liberté chérie ! Libre aux producteurs de choisir. Eu égard au génie des vignobles français, il nous a semblé utile de disposer d’un panoplie d’outils. Le débat est maintenant dans les régions. Les pouvoirs publics feront ce que les viticulteurs souhaiteront.

L’amendement 329 corrigé, mis aux voix, est adopté.

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APRÈS L’ART. 10 UNDECIES

M. André Chassaigne - Les amendements 432 et 436 concernent une question récurrente, celle des prix agricoles. De nombreuses filières sont touchées, qu’il s’agisse des fruits et légumes, de la viticulture, mais aussi des producteurs de lait ou de viande… Par l’amendement 432 je propose que le Gouvernement s’engage à tenir avant la fin 2004 une conférence des prix agricoles, rassemblant tous les acteurs du producteur au consommateur. Elle aurait pour objectifs de pérenniser les exploitations grâce à des prix rémunérateurs, d’encadrer les marges des intermédiaires et de la grande distribution et de garantir le pouvoir d’achat des consommateurs. Il y a sur ces questions beaucoup de « communication » de votre part, Monsieur le ministre, mais surtout de celle du ministre de l’économie ; mais au lieu d’en rester à des actions de secours comparables à celles des pompiers, ne pourrait-on mettre enfin en œuvre des mesures propres à garantir vraiment les prix ?

Quant à l’amendement 436, il tend à recréer, pour les cas de crise, le mécanisme du coefficient multiplicateur et à permettre son application immédiate. On l’a dit trop lourd, mais ce ne devrait pas être un problème pour une administration aussi bien rôdée que la vôtre.

M. Yves Coussain, rapporteur - Avis défavorable. L’amendement 432 est déclaratif et non normatif. Quant au 436, nous nous sommes déjà expliqués.

M. le Ministre de l’agriculture - Défavorable.

L’amendement 432, mis aux voix, n’est pas adopté, non plus que l’amendement 436.

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M. André Chassaigne - L’amendement 416 est défendu.

L’amendement 416, repoussé par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, n’est pas adopté.

L’article 11 D, mis aux voix, est adopté.

APRÈS L’ART. 11 D

M. Michel Bouvard - L’amendement 535 de M. Vannson est défendu.

M. François Brottes - L’amendement 701 est identique.

Les amendements 535 et 701, repoussés par la commission et par le Gouvernement, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

La suite du débat est renvoyée à une prochaine séance.

Prochaine séance ce matin, jeudi 14 octobre, à 9 heures 30.

La séance est levée à 1 heure.

Pour en savoir plus : Compte-rendu analytique sur le site de l’Assemblée

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