26-09-2006

Situation des pupilles de la Nation et orphelins de guerre ou du devoir

André Chassaigne souhaite attirer l’attention de Monsieur le Ministre sur la situation des pupilles de la Nation et orphelins de guerre ou du devoir.
Il rappelle la loi du 31 juillet 1917 accordant aux orphelins de guerre des mesures d’assistance. Souvent insuffisantes et peu sollicitées par pudeur et du fait des difficultés à produire les documents nécessaires à l’établissement des dossiers, ces mesures incluaient également un droit à réparation sous forme pécuniaire, que trois récents décrets ont en partie concrétisés.

Le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 institue une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites.
Le décret n°2004-751 du 27 juillet 2004 institue une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la deuxième guerre mondiale dans les conditions définies par les articles L.272, L.274, L.286, L.290 du Code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre.
Le décret n° 2005-477 du 17 mai 2005 en application de la loi du 23 février 2005 définit les modalités d’attribution des allocations dont bénéficient respectivement les pupilles de harkis et les harkis eux-mêmes.

Cependant, si ces décrets sont une avancée dans l’application du droit à réparation, ils introduisent du même coup un caractère discriminatoire en excluant des dispositions prévues une partie des orphelins de guerre. Cette situation génère des frustrations bien compréhensibles parmi les associations qui militent pour une pleine et entière reconnaissance des droits de tous les orphelins de guerre. C’est pourquoi, un dossier aussi sensible, lié aux événements historiques qui fondent la mémoire collective de notre pays, ne peut être traité de façon sélective au risque d’atteindre la dignité de tous ceux qui en ont payé le prix fort. L’Etat doit sans attendre attribuer un statut de reconnaissance morale et matérielle à l’ensemble des orphelins de guerre.

En conséquence, André Chassaigne souhaite que Monsieur le Ministre l’informe des mesures qu’il envisage de prendre ainsi que des délais nécessaires à leur définition afin que les orphelins de toutes les guerres (guerre de 14-18, guerre de 39-45, guerre d’Indochine, d’Afrique du Nord, etc.) bénéficient d’un même droit à réparation, sous la même forme de rente viagère mensuelle, et d’un montant identique à celui dont bénéficient les orphelins concernés par les décrets du 13 juillet 2000 et du 27 juillet 2004.
Il souhaite également connaître d’une façon plus générale les dispositions morales et matérielles que Monsieur le Ministre compte mettre en application afin de permettre une pleine réparation et ce en étroite concertation avec les associations concernées.

Réponse du Ministre :

Le décret n° 2004-751 du 27 juillet 2004 instituant une aide financière en reconnaissance des souffrances endurées par les orphelins dont les parents ont été victimes d’actes de barbarie durant la Seconde Guerre mondiale étend aux orphelins des déportés résistants et politiques morts en déportation et des personnes arrêtées et exécutées dans les conditions définies aux articles L. 274 et L. 290 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre le bénéfice de l’indemnisation prévue par le décret n° 2000-657 du 13 juillet 2000 instituant une mesure de réparation pour les orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites.

Aboutissement d’une démarche engagée dès le mois de mai 2002 à la demande du Président de la République, cette mesure est conforme aux préconisations du rapport remis au Premier ministre par M. Philippe Dechartre. Le périmètre des ressortissants, soumis à l’avis du Conseil d’État, présente les meilleures garanties de solidité juridique. Le ministre délégué aux anciens combattants insiste sur le caractère symbolique de cette décision, les victimes d’actes de barbarie ayant subi un traumatisme dépassant le strict cadre d’un conflit entre États. La Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (HALDE) a d’ailleurs précisé, dans sa délibération du 17 novembre 2005, que cette mesure visait à indemniser le préjudice subi par des orphelins dont les parents sont décédés « dans le cadre d’une politique de collaboration et d’extermination », ce qui les plaçait dans une situation « différente » justifiant la mise en œuvre de « mesures spécifiques ».

Il convient d’ajouter que les orphelins de guerre ont bénéficié d’un droit à réparation prévu par le code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre lorsque la victime est décédée au cours ou des suites du service. Tous les orphelins remplissant les conditions légales pour bénéficier du droit ainsi défini, et qui en ont fait la demande, ont perçu ces pensions. Pour les orphelins de militaires morts pour la France, cette indemnisation s’est concrétisée par le versement d’un supplément s’ajoutant à la pension de veuve, et ce jusqu’au 21e anniversaire de l’enfant.

Par ailleurs, tous les orphelins de guerre sont ressortissants de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) et peuvent bénéficier, à ce titre, de l’assistance de cet établissement public, dispensée notamment sous la forme d’aides ou de secours en cas de maladie, absence de ressources ou difficultés momentanées.

S’agissant du statut des pupilles de la nation, le ministre est disposé à étudier les propositions d’adaptation qui lui seraient adressées. Parfaitement conscient de l’étendue du drame vécu par les orphelins de guerre, le ministre souligne que le Gouvernement s’est attaché à faire prévaloir l’équité entre les victimes de la Seconde Guerre mondiale, dans le respect scrupuleux des situations spécifiques. Enfin, le ministre précise que le dispositif d’indemnisation mis en place par la loi n° 2005-158 du 23 février 2005 portant reconnaissance de la nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés est totalement distinct de la mesure instituée par le décret du 27 juillet 2004, et qu’ils ne sauraient être confondus. En effet, la prise en compte de la situation matérielle des rapatriés d’Algérie, qui ont dû, avec leur famille, s’expatrier, n’est en rien comparable avec le caractère symbolique de l’indemnisation des orphelins de déportés dont le décret du 27 juillet 2004 entend reconnaître la spécificité des souffrances endurées lors du second conflit mondial.

Pour en savoir plus : suivi / Eric Dubourgnoux

P.-S.

Question n° 105743 publiée au JO du 03/10/06
Réponse publiée au JO du 28/11/06.

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