Séance publique
2e séance du mardi 18 mai 2010 - 15h
Débat sur l’application de la loi relative à la modernisation de l’économie M. le président. L’ordre du jour appelle le débat sur l’application de la loi relative à la modernisation de l’économie.
L’organisation de ce débat ayant été demandée par la commission des affaires économiques, la parole est à son président et co-rapporteur pour l’application de la loi, M. Patrick Ollier.
(…)
M. le président. La parole est à M. André Chassaigne.
M. André Chassaigne. Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, deux ans après l’entrée en application de la LME, les fournisseurs de la grande distribution, qu’ils soient producteurs agricoles, industriels alimentaires ou fabricants de produits manufacturés, rencontrent des difficultés grandissantes dans leurs relations commerciales. Ces difficultés tiennent d’abord à la simple application de la loi, laquelle a supprimé la primauté du tarif et des conditions générales de vente, ouvrant ainsi la voie à une négociation déséquilibrée qui donne à l’acheteur une pleine liberté, avec des résultats désastreux en termes de prix garantis : c’est le renard libre dans le poulailler libre !
Ces difficultés sont aggravées par un détournement de la loi au détriment des fournisseurs. J’en prendrai quelques exemples.
Les conventions annuelles se signent selon le bon vouloir de l’acheteur, sans formalisme sur les dates et même, souvent, sans engagements concrets ni vérifiables. Par ailleurs, les délais de paiement sont contournés par l’obligation de livraison anticipée sur des plateaux logistiques aux frais du fournisseur, qui assume les charges de stockage et supporte le coût des dégradations éventuelles, avec l’ouverture du délai de paiement au départ du lieu de stockage : les exemples de cette pratique particulièrement choquante sont multiples. Dans d’autres cas, les achats se font à flux tendu, par petites quantités, avec des coûts de transport beaucoup plus élevés et une multiplication, sur les routes, de camions de petite capacité, ce qui augmente d’autant la pollution.
Ces problèmes, connus des services publics, m’amènent à poser trois questions. En premier lieu, quels sont les contrôles effectués et le bilan des poursuites judiciaires visant à assurer l’effectivité de la loi et à lutter contre ses détournements ? Le renforcement de ces contrôles reste-t-il possible, compte tenu des suppressions d’emploi qu’impose globalement la révision générale des politiques publiques à la DGCCRF ? Le Gouvernement proposera-t-il prochainement une modification en profondeur des dispositions commerciales de la LME afin de garantir des prix rémunérateurs aux producteurs, aux transformateurs et aux fabricants ?
M. Pierre Gosnat. Très bien !
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État.
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Vous avez posé, monsieur Chassaigne, des questions précises, auxquelles je vais m’efforcer de répondre tout aussi précisément.
Les relations commerciales font l’objet d’un plan de contrôle national de la DGCCRF, mis en place par les brigades LME. La mise en œuvre de la négociabilité et la lutte contre les pratiques abusives en constituent bien entendu le cœur. Les deux aspects, négociabilité et lutte contre les pratiques abusives, sont même liés. Le code de commerce prévoit, suivant les cas, des sanctions civiles ou pénales, et même des procédures de transaction pénale. L’ensemble des pratiques abusives relèvent d’un dispositif de contrôle de sanctions adapté, destiné à assurer la pleine effectivité de la loi.
Ces contrôles portent plus précisément sur les conditions de la négociation commerciale, la légalité des contrats et les pratiques des acteurs économiques : ils permettent de vérifier si des déséquilibres significatifs, au sens de la LME, apparaissent entre les fournisseurs et les distributeurs. Trente et une enquêtes spécifiques portant sur les différentes pratiques constatées sont actuellement en cours et, s’agissant des assignations des principales enseignes de la distribution, les jugements doivent intervenir dans les semaines et les mois qui viennent.
Nous mobilisons tous les moyens nécessaires pour mener à bien cette politique prioritaire de contrôle, et nous continuerons de le faire. Les brigades LME, créées en 2009, sont bien en place, et leur efficacité a permis d’assigner certains distributeurs en juin 2009. J’aurai l’occasion, le 31 mai prochain, de dresser le bilan de ces assignations et d’indiquer les éventuelles actions à mener si les pratiques incriminées subsistent.
Le Gouvernement n’a en revanche nullement l’intention, monsieur Chassaigne, de modifier la LME en ce qui concerne les relations commerciales. D’une part, il considère que, dans l’intérêt des opérateurs économiques et pour des raisons de sécurité juridique, les normes en la matière doivent être stabilisées : on ne va pas en changer tous les ans !
M. François Brottes. C’est pourtant l’un des objets du projet de loi de modernisation de l’agriculture !
M. Hervé Novelli, secrétaire d’État. Les relations commerciales pourront être assainies dans la durée et par une politique ferme de sanctions ; c’est à quoi s’attache précisément le Gouvernement.
Hier, en présence de tous les acteurs de la filière agricole et alimentaire, le Président de la République a indiqué avec la plus grande clarté que négociabilité et contrôle des pratiques abusives – assorti de sanctions si elles perdurent – étaient liés.
M. le président. Nous en venons aux questions du groupe Nouveau Centre.
(fin de son intervention)